Analyse des données par les chercheurs français
Des médecins hospitaliers et chercheurs de l’Inserm et de l’Université Paris Cité ont examiné les cas de près de 900 enfants hospitalisés pour scorbut en France entre 2014 et 2023. Selon cette étude, publiée dans la revue médicale The Lancet, la majorité des cas concernait des enfants âgés de 4 à 10 ans, appartenant à des familles en situation de précarité.
Le Dr Ulrich Meinzer, pédiatre à l’hôpital Robert-Debré de Paris et coordinateur de l'étude, a précisé que 32,9 % des enfants hospitalisés venaient de familles bénéficiant de la couverture maladie universelle, un indicateur de très bas revenus. Certaines infirmières ont signalé que certains enfants n’avaient pas mangé depuis plusieurs jours avant leur admission.
Une augmentation marquée depuis la pandémie
Bien que le nombre de cas ait augmenté lentement jusqu'en 2019, les chercheurs ont observé une hausse significative, de 34,5 %, des hospitalisations pour scorbut à partir de mars 2020. Cette période coïncide avec les débuts de la pandémie de Covid-19 et ses répercussions économiques.
L'étude attribue cette recrudescence à plusieurs facteurs, notamment :
● Les séquelles durables de la pandémie sur la sécurité alimentaire.
● Les conflits géopolitiques, comme la guerre en Ukraine, ayant perturbé les chaînes d'approvisionnement alimentaire.
●L’inflation alimentaire en France, atteignant 15 % en janvier 2023, soit plus du double du taux d’inflation global.
Ces éléments ont accru la dépendance des populations précaires aux aides alimentaires publiques et bénévoles, souvent insuffisantes pour fournir une alimentation équilibrée.
Les impacts d’une alimentation déséquilibrée
Le scorbut est directement lié à une carence en vitamine C, présente dans les agrumes et les légumes verts. Le rapport souligne que l'accès à ces aliments devient de plus en plus difficile pour les familles modestes, contraintes d'acheter des produits transformés moins nutritifs.
Le Dr Meinzer a déclaré : « Les familles pauvres ne peuvent plus se permettre d’acheter des fruits ou des légumes en quantité suffisante. » Cette situation met en lumière des disparités croissantes dans l’accès à une alimentation saine et nutritive en France.
Des solutions pour enrayer le problème
Pour lutter contre ce phénomène, le rapport recommande plusieurs mesures :
Renforcer les programmes d’aide alimentaire et sociale.
Former les professionnels de santé à détecter rapidement les cas de scorbut.
Mettre en place des campagnes de dépistage proactives pour les populations à risque.
Meinzer a insisté sur l’importance d’un régime équilibré pour les enfants : « Cela commence par des produits frais, cuits délicatement. » Il a également souligné que cette situation constitue un véritable problème de santé publique et appelé à une action concertée des professionnels, travailleurs sociaux et décideurs politiques.
Le scorbut, autrefois surnommé "la maladie des marins", rappelle que l’insécurité alimentaire peut avoir des conséquences graves, même dans des pays développés comme la France.
Source: rfi.fr