Une découverte au cœur de la restauration de Notre-Dame
En 2022, au cours des travaux de restauration de la cathédrale Notre-Dame, les chercheurs ont mis au jour deux sarcophages en plomb à la croisée du transept. Si l'un des deux, identifié grâce à une épitaphe, appartenait au chanoine Antoine de La Porte, l'autre est resté sans identité pendant plusieurs mois. Les analyses approfondies menées à l'institut médico-légal du CHU de Toulouse ont révélé des éléments surprenants concernant ce mystérieux défunt.
Ce sarcophage contenait les restes d'un homme d'une trentaine d'années, présentant des caractéristiques physiques et médicales uniques. Des déformations osseuses indiquaient qu’il était un cavalier expérimenté, et des signes d’autopsie, notamment une incision du crâne, témoignaient d'une embaumement post-mortem. Surtout, les ossements portaient les traces d’une pathologie extrêmement rare : une tuberculose osseuse cervicale, probablement accompagnée d’une méningite chronique.
Le profil qui correspond à celui de du Bellay
Cette maladie rare ainsi que d'autres indices physiologiques rapprochent ce portrait médical de celui de Joachim du Bellay. Né en 1522 à Liré, en Anjou, Du Bellay était un poète émérite, mais aussi un homme malade. Dans ses lettres et ses poèmes, il fait allusion à sa surdité et à ses maux de tête, deux symptômes de la méningite chronique. Ces correspondances, ajoutées à son parcours de cavalier entre Paris et Rome, où il a passé plusieurs années auprès de son oncle, le cardinal Jean du Bellay, renforcent l'hypothèse qu'il pourrait s'agir de sa dépouille.
Selon Eric Cubrézy, médecin et archéologue impliqué dans l'étude des restes, Du Bellay aurait souffert de tuberculose durant son voyage à cheval entre Paris et Rome, un exploit physique considérable pour quelqu’un atteint d'une telle maladie. Le poète est décédé en janvier 1560, à l'âge de 37 ans, après son retour en France. Sa famille avait demandé son inhumation dans la chapelle Saint-Crépin de Notre-Dame, mais sa tombe n'avait jamais été retrouvée lors des travaux ultérieurs dans la cathédrale.
Des doutes persistants
Malgré ces indices, l'identité de la personne reposant dans le sarcophage n'est pas encore définitivement confirmée. Christophe Besnier, l'un des responsables des fouilles, souligne que certaines analyses, notamment celles des isotopes, indiquent que le défunt a vécu dans la région parisienne ou en Rhône-Alpes jusqu’à l'âge de dix ans, ce qui ne correspondrait pas à la biographie connue de Du Bellay. De plus, l'absence de sa tombe à l'emplacement présumé de Saint-Crépin laisse planer des doutes. Des études supplémentaires, dont une qui pourrait préciser l'âge exact du défunt à sa mort, sont en cours et devraient apporter des réponses plus claires.
D'autres découvertes lors des fouilles
Les fouilles archéologiques à Notre-Dame n'ont pas seulement révélé ces deux sarcophages. Elles ont également permis de mettre au jour de nombreux fragments de l'ancien jubé, une tribune en pierre datant du Moyen Âge, qui séparait le chœur de la nef. Ce jubé, détruit au XVIIIe siècle, avait presque disparu des mémoires, mais plus de 700 fragments retrouvés présentent encore leur polychromie d'origine. Ces découvertes contribuent à enrichir l'histoire de Notre-Dame, qui devrait rouvrir ses portes début décembre.
Bien que l'identification définitive de la sépulture de Joachim du Bellay reste à confirmer, cette découverte archéologique à Notre-Dame ouvre une nouvelle page fascinante de l'histoire de la cathédrale et de la Renaissance française. Les résultats des recherches en cours devraient bientôt apporter des éclaircissements supplémentaires. En attendant, cette hypothèse renforce l'intérêt pour l'une des figures majeures de la poésie française du XVIe siècle.
Source: information.tv5monde.com